L’association AMEPCI-Gira Ubuntu (Association pour la mémoire et la protection de l’humanité contre les crimes internationaux) organise, ce 15 décembre, la journée de commémoration des victimes de toutes les tragédies qu’a connues le Burundi. C’est sa deuxième édition.
Pourquoi le choix de cette date ? Rappelle-t-elle une tragédie oubliée ?
Cette date est le fruit d’un dialogue, elle a été convenue entre 9 associations de victimes, membres d’AMPECI, pour nous souvenir ensemble des nôtres emportés par différentes crises qui ont endeuillé le Burundi. Certaines parmi elles sont quasiment composées de Tutsi, d’autres ne comptent que des Hutu. Mais il y en a qui sont mixtes. Ces associations militent pour que cette date soit officiellement reconnue comme une journée nationale de commémoration collective des victimes de toutes les crises qui ont secoué le Burundi. La tâche n’était pas facile. Après cet accord de commémorer cette journée dédiée à toutes les victimes le 15 décembre de chaque année, les membres des différentes associations ont convenu de se souvenir des leurs, chacune selon ce qu’elle considère comme journée noire.
«Discuter pour se comprendre et se réconcilier », c’est le thème choisi cette année. Pourquoi ?
L’objectif de cette commémoration est d’amener les gens à se mettre ensemble. Il n’y a pas très longtemps, les victimes tutsi considéraient malheureusement, et souvent à tort, les victimes hutu comme étant leurs bourreaux et vice versa, alors que les deux catégories étaient des victimes qui ont normalement les mêmes droits à revendiquer.
La philosophie qui est derrière cette commémoration, c’est l’empathie, l’écoute de l’autre pour pouvoir comprendre que l’autre a aussi souffert. C’est le droit à la mémoire, à la vérité, à la réparation, à la justice, à la non répétition des crimes.
Qu’en est-il de la mise en place de la CVR ?
Rien ne bouge du côté de l’adoption des textes régissant cette Commission Vérité et Réconciliation. Cette journée du 15 décembre correspond à une année, jour pour jour, après le dépôt à l’Assemblée nationale du projet de loi régissant la CVR. 365 jours viennent de passer et ce texte n’a pas encore été analysé, malgré les promesses de la mise en place de la CVR exprimées par les plus hautes autorités. Il y a urgence parce que la plupart des preuves ou des personnes détenant la vérité sur ce qui s’est passé en 1965, 1972…sont en train de disparaître. Pour les événements de 1988 ou de 1993, la plupart des acteurs sont encore en vie et en bonne santé pour témoigner. Les archives aussi deviennent rares ou sont tout simplement détruites.
L’association AMEPCI vient de faire une tournée à l’intérieur du pays, c’était pour quel objectif ?
Il y a eu plus de 3.000 participants dont des administratifs et c’était pour conscientiser la population sur la gestion des mémoires comme les fosses communes, l’établissement des listes des personnes disparues. Ce qu’on constate avec ces séances, c’est que les gens veulent briser le silence.
Dernièrement, le témoignage émouvant d’une veuve de 1972 a fait pleurer toute la salle, et quand une femme tutsi, qui a perdu plusieurs membres de sa famille, a témoigné, les gens n’ont pas pu retenir leurs larmes. Cela montre qu’il y a empathie, on souffre avec l’autre. C’est un début.
Est-ce qu’il n’y a pas polarisation ou politisation dans la gestion des mémoires ou des commémorations ?
Ces questions ont été pendant longtemps politisées. Et les séquelles sont là. Au lieu de se souvenir des personnes disparues, toute l’attention est focalisée sur les gens qui les auraient massacrés, les « bourreaux honnis ». Il y a eu par le passé sélection des journées à commémorer. A un certain moment, c’était seulement Rwagasore et le « soldat inconnu », rien pour Ngendandumwe.
Mais les choses évoluent. A côté de la mémoire officielle et des commémorations d’envergure nationale, il y a des levées de deuil privées organisées 50 ans après, comme la famille de Mirerekano ou du président de la République. Aujourd’hui, on est en train d’avoir une mémoire plurielle et cela contribue à la réconciliation.
C’est une bonne initiative si elle peut apaiser les esprits! Attendons voir ce que cette association produira mais c’est prometteur!
Une petite remarque: CRIMES INTERNATIONAUX sinumva ico bivuga. Ryoba ari ikosa? Jewe narinzi CRIMES CONTRE L’HUMANITE.
Merci.
AU moins ça ! Les burundais commencent à comprendre que les bourreaux, même s’ils ont une ethnie, ils ne sont ethniquement bourreaux, c’est plutôt la recherche d’intérêts égoïstes qui a fait d’eux des bourreaux et criminels, intérêts qui d’ailleurs n’ont pas été redistribués à tous les membres de leurs ethnies, même si certains en ont vraiment profité. L’ethnie a été un moyen de propagande et non une raison profonde en soi. Mais pour les victimes, la seule raison de mort a été souvent et surtout la simple appartenance à une ethnie. La conscience burundaise se réveille et va croissante chaque jour.
Ndabatuye ka karirimbo Kavuga gati; » hahiriwe abaremesha amahoro, hahiriwe abaremesha urukundo »!! Courage!!