Lorsque les militaires arrivent à Rumonge, ils découvrent une ville martyre. Beaucoup de gens ont été tués. Les rebelles avaient vidé les lieux. Une terrible répression commence.
A Rumonge, les fonctionnaires survivants étaient regroupés dans le bureau du tribunal. La population était sommée de s’assoir sur le terrain de football.
Le colonel Sylvère Nzohabonayo m’a pris comme éclaireur, raconte Abdul Aziz. Il a chargé l’administrateur communal d’héberger momentanément les rescapés à la prison de Murembwe.
Avec les militaires, nous avons commencé à chercher les survivants à partir de 7 heures. « Nous ratissions la région, maison par maison. Nous sommes arrivés à Mugara vers 12 heures alors que la distance entre Rumonge et Mugara n’est que de 17 kilomètres. Les militaires ont installé leur poste de commandement à l’église pentecôte de Mugara. »
Vers 15 heures, précise-t-il, les rebelles ont attaqué cette position. Ils n’ont pas hésité à affronter tout le bataillon qui s’était déplacé à Mugara en criant « mai mulele », se rappelle-t-il. « Malgré les tirs des militaires, ces rebelles continuaient à avancer. Ils étaient visiblement drogués. L’attaque a duré une heure. » Les rebelles ont été défaits.
Le 5 mai 1972, se souvient l’ancien policier, les militaires se sont dirigés vers Nyanza-lac. Mais arrivés à Kigwena, ils ont appris que les rebelles avaient tué un certain Mpfayokurera, directeur de l’école primaire de Kigwena ainsi que d’autres personnes le 29 avril : « C’est là que nous avons su que ces rebelles avaient aussi brûlé des maisons à Vyanda et attaqué le camp de Bururi. Ce camp a été attaqué vers 23 heures mais il n’y a pas eu des dégâts car les militaires les ont rapidement repoussés. »
Abdul Aziz Ntahiraja se rappelle qu’ils sont arrivés à Nyanza-lac, vendredi vers 15 heures et ont appris qu’un certain Basumbwa, grand frère d’Albert Shibura (chef de secteur de Nyanza-lac), ainsi que plusieurs Tutsi avaient été tués dans la journée du 29 avril.
Le policier a passé neuf jours à Nyanza-lac avant de se rendre à Bururi. Arrivé sur place, Monseigneur Bernard Bududira, évêque de Bururi avait pris l’initiative d’administrer cette province car les chefs administratifs avaient été tous tués, à commencer par le gouverneur, ajoute-t-il : « Il assurait les affaires courantes et réunissait des fois les fonctionnaires. C’est lui qui récupérait aussi les rescapés. »
C’est à ce moment- là, indique l’ancien policier, que la répression a commencé : « Six enseignantes Hutu de Bururi ont été tuées. Albert Shibura a nommé Salvator Barakobeje, alors substitut à la place du procureur. C’est lui qui signait des mandats d’arrêts. »
Une semaine après, poursuit-il, il y a eu une épuration à l’école normale de Kiremba. Des gendarmes, commandés par le commandant Vincent Ndikumana, signale-t-il, ont exécuté des élèves hutu à la prison et ont jeté leurs corps à la rivière Siguvyaye. La plupart des corps des Hutu tués y ont d’ailleurs été jetés. « Ces exécutions se sont surtout observés dans les communes Matana et Songa où la population tutsi aidait les militaires à tuer toute personne de l’ethnie hutu ».
A Rumonge, la répression commence mardi le 2 mai à 17 heures. Quand les militaires arrivent, les rebelles étaient déjà partis à bord des bateaux vers la Tanzanie comme ils étaient venus. Cette rébellion avait été organisée par un certain Ézéchiel Biyorero.